
Se garder au chaud en sauvant les monarques
Depuis sa tendre enfance, Gabriel Gouveia est fasciné par une plante, l’asclépiade. Celle-ci est à la base de l'alimentation du papillon monarque. Cependant, les fibres contenues dans ces cocottes ont des propriétés isolantes supérieures à plusieurs autres matériaux. Depuis quelques années, ce jeune entrepreneur québécois conçoit et fabrique des objets qui mettent en valeur cette plante et ainsi favorisent la survie du monarque. Son entreprise, Lasclay, a vu le jour il n’y a pas si longtemps.
Tout a commencé il y a quelques années. L’homme originaire de la région de Québec désire monter une entreprise de distribution de mitaines isolées avec de l’asclépiade. La culture de l’asclépiade avait connu des heures plus glorieuses. Des entreprises qui confectionnaient des rouleaux d'isolant avec cette fibre avaient convaincu plusieurs cultivateurs de se lancer dans la culture de cette plante qu’on disait être une mauvaise herbe. Malheureusement, ces entreprises ont dû fermer leurs portes et la culture de l’asclépiade a alors grandement diminué.
M. Gouveia s’est dit qu’il fallait agir vite si l’on voulait encourager les quelques producteurs qui faisaient encore pousser l’asclépiade à continuer leur travail. Cette plante favorise la survie du papillon monarque, mais produit aussi une fibre parfaite qui a des propriétés isolantes de haute qualité. Celle-ci est plus légère que tout autre isolant et n’absorbe pas l’eau. Parfaite pour notre climat parfois capricieux. Au début, il concevait les croquis de ses mitaines et la confection était donnée en sous-traitance. Il a vite constaté que ce procédé n’était pas rentable, car la fabrication prenait trop de temps et il fallait alors demander un prix trop élevé.
Il se lance alors lui-même dans la confection de ses produits. C’est là que les difficultés commencent à s'accumuler. Le premier problème à résoudre, c'est l’opération de bourrage des mitaines. La fibre d’asclépiade est très légère et reste difficilement en place le temps de coudre les mitaines. Il doit donc trouver un processus permettant de contourner ce problème tout en réduisant le temps de manipulation pour que la confection soit rentable. Il réalise rapidement qu’il devra repenser toutes les étapes de fabrication de ses produits s’il veut que son entreprise fleurisse. Loin de se décourager, il va mettre au point une méthode de travail qui lui permettra de suffire à la demande, car il est victime de son succès. Dès le début,il y a beaucoup d'engouement pour son produit très efficace et bon pour l'environnement. Il connaît un envol inattendu. Pour réussir son pari, M. Gouveia va mettre à profit plusieurs outils. En combinant le travail d’une imprimante 3D et d’une découpeuse numérique, il va concevoir et créer les outils dont il aura besoin. Il va aussi mettre en place des programmes informatiques afin de le soutenir lors des nombreuses étapes de fabrication de ses produits. Il a choisi de faire grandir son entreprise lentement afin de s’assurer que chaque nouvelle façon de faire qu’il mettra en place donnera le résultat escompté avant de passer à la prochaine étape. Une fois qu’une station de travail fonctionne bien, on n’a qu'à en multiplier le nombre. Ainsi l’entreprise grandit sur des bases solides, souligne-t-il.
Lors de la première année d'existence de l’entreprise, M. Gouveia pensait produire une centaine de paires de mitaines. Il était loin de se douter qu’une simple publicité en ligne allait susciter autant d’engouement. Tout démarre sur les chapeaux de roue et il doit confectionner 1200 paires de mitaines pour subvenir à la demande. Ses deux collègues et lui ont dû travailler 16 heures par jour durant quatre mois pour y arriver. La deuxième année, ils ont fait 2000 paires et ont lancé un nouveau produit, le foulard. Aujourd’hui, Lasclay fabrique et distribue une trentaine de produits différents. En plus des mitaines et des foulards, l’entreprise fait aussi des tuques, des sous-plats, des sacs à lunch, des semelles isolantes et de nombreux autres objets.
La plus grande fierté de ce jeune entrepreneur est d’avoir réussi à mettre en valeur une plante unique qui contribue à la santé de notre planète. Les champs d’asclépiades nourrissent les monarques, mais ils sont aussi un lieu recherché par les pollinisateurs. Ils regorgent de biodiversité et, de plus, ils absorbent le carbone de l’atmosphère. Cette culture se fait presque sans fertilisant ou insecticide, ajoute l’entrepreneur. Celui-ci parle de l’asclépiade comme d’une ressource qui n’a que des avantages dont on se doit de profiter. Sa passion pour une plante et son intérêt pour l'environnement sont les bases de ce qui est devenu une entreprise bien québécoise unique au monde.